DÉCLARATION DU DR. DENIS MUKWEGE SUR LA SAISIE D'ACTIFS
(LOS ANGELES, CA) Vous trouverez ci-dessous une déclaration du Dr Denis Mukwege, fondateur de l'hôpital et des fondations Panzi, en sa qualité de directeur médical. Cette déclaration a été lue par le Dr Mukwege lors d'une conférence de presse à l'hôpital. La déclaration originale en français est également disponible.
Le 31 décembre 2014, le personnel de l'hôpital général de référence de Panzi s'est mis en grève et a pris l'initiative d'organiser une manifestation pacifique devant le bâtiment de la Direction générale des impôts (DGI) pour dénoncer ce qui suit :
1. La discrimination à l'encontre de l'Hôpital.
L'Hôpital de Panzi est une structure médicale intégrée au système de santé de la République Démocratique du Congo et a le statut d'Hôpital Général de Référence. Ses employés sont donc des agents de l'Etat et, comme les autres personnels des hôpitaux de référence générale en RDC, les impôts sur leurs salaires de base sont retenus à la source par le Ministère des Finances.
Parmi près de 500 hôpitaux généraux de référence en RDC, l'hôpital de Panzi est le seul à avoir été soumis à un impôt spécial sur le revenu, un prélèvement sur les primes qu'ils reçoivent de l'hôpital. Les employés se plaignent que leur hôpital est victime d'une discrimination flagrante de la part de la DGI et réclament l'équité fiscale.
2. Violation des droits de l'homme
La direction de l'hôpital général de référence de Panzi est extrêmement préoccupée par cette situation qui entraîne diverses violations des droits de l'homme : droit à la santé pour les patients, y compris le droit à la vie pour ceux qui ont besoin de médicaments et d'autres fournitures médicales ; mais aussi violation du droit de ses employés à être rémunérés pour leur travail, étant donné que les fonds saisis étaient destinés à payer les salaires des employés et à acheter des médicaments.
3. Dysfonctionnement du système judiciaire.
L'hôpital général de référence de Panzi a déposé un procès à la Cour d'appel de Bukavu contre la DGI, la RDC et la BCDC (Commercial Bank of Congo), en cours depuis le 4 novembre 2014, en rapport avec les violations susmentionnées. L'affaire, initialement prévue le 18 novembre 2014, a été reportée à plusieurs reprises en raison d'abord d'une grève des juges, puis du décès d'un juge à la veille de la date d'audience. L'audience a été reportée indéfiniment depuis lors.
Malgré l'absence de décision judiciaire sur ces questions, la DGI a agi et a saisi le compte de l'hôpital général de référence de Panzi. Avec la complicité de la BCDC Bank, la DGI a transféré les fonds de Panzi sur son compte. Ceci en violation de l'article 127 du Code de procédure civile congolais qui énumère les éléments insaisissables, dont les salaires.
4. Procédures fiscales irrégulières.
Les procédures fiscales ont été violées par la DGI :
- En moins de dix jours, la DGI a lancé un ordre officiel de taxation et deux demandes de paiement et de recouvrement sans respecter le délai de six mois prévu par la loi ;
- La DGI n'a pas donné à l'hôpital général de référence de Panzi la possibilité de contester et d'introduire un recours administratif.
Il est extrêmement urgent d'agir dans l'intérêt des patients, envers lesquels nous avons la responsabilité de fournir les meilleurs services de soins de santé, et du personnel de Panzi, qui ne peut recevoir son salaire.
La direction de l'hôpital de Panzi a contacté diverses autorités à ce sujet mais n'a reçu aucune réponse satisfaisante à ce jour. Elle reste ouverte à tout dialogue constructif avec elles afin de résoudre cette crise.
Le personnel de Panzi aspire à la justice en reconnaissant les vices de procédure qui rendent cette taxation discriminatoire, et espère toujours assurer le bon fonctionnement et la continuité des services fournis par notre établissement de santé publique.
Denis Mukwege
Directeur médical.
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En date du 31 décembre 2014, le personnel de l'Hôpital Général de Référence de Panzi est entré en grève et a pris l'initiative d'organiser une manifestation pacifique devant le bâtiment de la Direction Générale des Impôts (DGI) en vue de dénoncer ce qui suit :
1. La discrimination dont leur Hôpital est victime.
En effet, l'Hôpital de Panzi est une structure intégrée dans le système sanitaire de la République Démocratique du Congo (RDC) et possède le statut d'Hôpital Général de Référence (HGR). De ce fait, ses employés sont des agents de l'Etat à part entière, à l'instar du personnel d'autres HGR de la RDC qui sont soumis à un régime fiscal de prélèvement à la source par le Ministère des Finances.
Parmi près de 500 HGR que compte la RDC, l'Hôpital de Panzi est le seul soumis à une mesure fiscale particulière qui est l'impôt sur le revenu professionnel. Les agents dénoncent le fait que leur Hôpital soit victime d'une discrimination flagrante de la part de la DGI et réclament une équité fiscale.
2. Violation des droits de l'Homme.
La Direction de l'HGR/Panzi est extrêmement préoccupée par cette situation qui entraîne par voie de conséquence diverses violations des droits humains : droit à la santé pour les malades, dont le droit à la vie est mis en péril à défaut d'approvisionnement en médicaments et autres fournitures nécessaires pour prodiguer des soins, mais aussi violation du droit de ses agents à percevoir leur rémunération pour leur travail presté, étant donné que le montant saisi par la DGI était destiné à la paie des agents et à l'approvisionnement de l'hôpital en médicaments.
3. Dysfonctionnement de l'appareil judiciaire.
L'HGR/Panzi a assigné en justice devant la Cour d'Appel de Bukavu la DGI, la Banque commerciale du Congo (BCDC), et l'Etat congolais depuis le 04 Novembre 2014 en rapport avec ces violations sus évoquées. L'affaire fixée initialement le 18 Novembre 2014 a été successivement reportée suite d'une part
à la grève des magistrats, et d'autre part suite au décès d'un magistrat de la Cour à la veille de la date d'audience. Cette dernière a été renvoyée sine die.
Malgré l'absence de décision judiciaire liée à ces dysfonctionnements, la DGI a procédé à la saisie effective du compte de l'HGR de Panzi, en violation de l'article 127 du Code de procédure civile congolais qui énumère une liste de biens qui ne sont pas susceptibles de saisie, qui inclut le salaire.
4. Vices de procédures fiscales.
La procédure fiscale prévue par les dispositions légales a été violée par la DGI :
- En moins de dix jours, elle a activé une taxation d'office, deux avis de mise en recouvrement et les commandements ; sans respect des délais de six mois prévus par la loi.
- Elle n'a pas accordé à l'HGR/Panzi la possibilité de jouir de droit d'opposition et de recours administratif.
Il y a une urgence extrême à agir, dans l'intérêt des malades dont nous avons la responsabilité d'apporter les meilleurs services de santé, et pour le personnel de Panzi, qui n'a pas pu percevoir sa rémunération.
La Direction de l'HGR/Panzi a contacté les différentes autorités impliquées sans obtenir une réponse satisfaisante à ce jour et demeure encline à entamer un dialogue constructif avec ces dernières pour sortir de cette crise.
Le personnel de Panzi aspire à voir la justice reconnaître les vices de procédure qui rendent cette imposition discriminatoire et garde l'espoir d'assurer le bon fonctionnement et la continuité des services fournis par notre structure sanitaire publique.
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