Dr. Denis Mukwege – Grandes Conférences Catholiques

Le modèle d’assistance holistique de Panzi, de la prise en charge médicale jusqu’à rendre la femme autonome

Excellences Messieurs les Ministres d’Etat, 
Excellence Monsieur l’Ambassadeur du Royaume de Belgique pour la région des Grands Lacs,
Monsieur le Président des Grandes Conférences Catholiques,
Distingués invités,
Mesdames, Messieurs,
 
Je vous remercie de m’inviter ce soir pour parler de notre travail mené à Panzi depuis plus de quinze ans.

Vous avez la réputation d’être animés d’un esprit d’ouverture, de curiosité et de liberté de pensée. Et pour vous faire une opinion sur un sujet donné, vous ne vous contentez pas d’information de seconde main, susceptible d’être altérée ou déformée, vous préférez chercher votre information à la source.
 
Cette attitude noble nous rend heureux – heureux d’avoir la parole, mais surtout heureux d’être écouté ce soir.
 
Il y a quelques années, en voyageant dans le métro bruxellois, j’ai été frappé par une accroche d’une campagne de sensibilisation du Centre de prévention du suicide qui disait ceci : « Un homme existe lorsque sa voix est écoutée ». Cette phrase, qui m’a profondément bouleversé, m’a très vite plongé dans la réalité du drame que vivent les femmes congolaises à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC).
 
Depuis vingt ans, la mort et l’horreur sévissent dans les Kivus. Vingt années de massacres et de viols ont engendré six millions de morts, près de deux millions déplacés et des centaines de milliers de femmes violées, avec son lot d’orphelins, d’enfants soldats, d’enfants issus de viol et de destins détruits. Aucune famille n’a été épargnée. Notre société est traumatisée et malade de la guerre et de la violence, de la corruption et de l’impunité, de la manipulation et du mensonge.
Pour des raisons de géopolitiques régionales et internationales, et alors que les auteurs de ces atrocités de masse ont été identifiés, peu a été fait pour que la justice soit rendue.
 
Ces millions de victimes dont la vie a été brisée, des familles décimés et des corps féminins détruits à jamais, n’ont pas le sentiment d’être écoutés.
 
Elles n’ont pas le sentiment d’être écoutées, ni par les autorités nationales qui sont censées les protéger, ni par les instances internationales qui, pourtant, se sont dotées d’instruments juridiques pour poursuivre et condamner de telles violations des droits de l’homme et du droit humanitaire.

«  Un homme existe lorsque sa voix est écoutée ».
 
C’est si et seulement si nous sommes écoutés, que nous aurons le sentiment d’exister et de partager une humanité commune.
 
Au cœur de l’Afrique, se trouve le Congo, un géant malade. La complexité du monde actuel fait qu’il ne peut pas s’en sortir seul. Son redressement est possible – il peut même être plus rapide que ce que l’on pourrait imaginer, mais cela ne pourra se produire que par un passage obligé de restauration de la vérité sur l’origine de cette violence qui a ravagé le pays, ses motifs, ses objectifs, et à qui profite ces massacres.
 
Si j’ai accepté avec beaucoup d’humilité l’invitation à prendre la parole à cette prestigieuse tribune, c’est parce que je suis convaincu que mes propos trouveront une écoute juste, compatissante et agissante.
 
Je suis convaincu que non seulement il y a parmi vous des gens qui aiment le Congo, mais aussi que certains d’entre vous sont nés au Congo-Belge, comme moi d’ailleurs, et qu’ainsi, dans votre sang coule quelques anticorps de notre forêt tropicale, et votre mémoire profonde vous rappelle le parfum de ces essences rares évoquant la douceur équatoriale.
 
Je suis surtout convaincu que vous êtes tous des « amis de l’humanité » et des optimistes quant à la capacité qui est en l’Homme de vaincre toute adversité. Aussi, avec vous, je rêve d’un avenir meilleur pour tous les Congolais !
 
A l’occasion de cette conférence, je vais commencer par une brève introduction sur le phénomène des violences sexuelles (I), pour ensuite exposer ce que l’on entend par l’usage du viol comme arme de guerre, et analyser son impact et ses conséquences (II). Nous vous présenterons ensuite « Le modèle d’assistance holistique de Panzi, de la prise en charge médicale jusqu’à rendre la femme autonome » (III) et avant de conclure (V), je partagerai quelques éléments de notre plaidoyer pour traiter les causes profondes de la violence (IV). 
 
**I. Introduction. Les violences sexuelles : un problème de santé publique et une violation majeure des droits de la femme. Une affaire de tous !**
 
La violence contre les femmes et les jeunes filles prend des formes multiples, et ces violences ne connaissent pas de barrières culturelles, sociales ou économiques. Elles nous concernent tous !
 
Elles englobent des coutumes rétrogrades, des normes sociales, des pratiques misogynes et discriminatoires, qui vont de la violence conjugale et domestique au harcèlement en milieu estudiantin, sur les lieux de travail ou dans les transports en commun, en passant par le mariage forcé d’enfants et le statut de la femme divorcée ou veuve, le trafic des êtres humains, les soi-disant «crimes d’honneur» et le viol.

La violence contre les femmes et les enfants est non seulement une violation grave des droits de la femme, et donc des droits de l’Homme, mais aussi une épidémie de santé publique et un obstacle à la résolution des défis globaux tels que l’extrême pauvreté, le VIH/SIDA et la gestion des conflits.
 
Cette violence dévaste les vies de millions de femmes dans les sociétés en conflit et en sortie de conflit, mais aussi en temps de paix.
 
Selon l’Organisation des Nations Unies, une femme sur trois dans le monde a été ou sera victime de violence physique ou sexuelle. Dans certaines régions du monde, des études avancent que 70 à 80% des femmes ont subi ou subiront ces violences.
 
Au sein de l’Union Européenne, 45 à 55% des femmes sont victimes de harcèlement sexuel depuis l’âge de 14 ans.
 
En Belgique, selon la revue Actualités du droit belge, 2882 viols ont été enregistrés en 2014. Cela représente 8 cas par jour.
 
Et partout, en Europe, en Afrique ou en Asie, ces chiffres ne constituent que la face émergée de l’iceberg, car partout, la honte, le silence, la stigmatisation, la peur de représailles empêchent trop souvent les femmes de porter plainte. Et lorsqu’elles ont le courage de le faire, la plupart font l’objet de la risée de ceux qui sont censés les protéger et leur rendre justice. Dans de nombreux cas, elles seront poursuivies elles-mêmes, pénalisant ainsi les victimes à la place de leurs bourreaux pour des infractions aussi surréalistes que le délit d’absence de vertu ou de provocation à la débauche ! 
 
Je partage ces quelques chiffres pour éclairer l’auditoire sur l’ampleur du phénomène qui nous rassemble aujourd’hui. Même si je n’aime pas les statistiques car je suis en bonne position pour vous dire à quel point derrière chaque chiffre se cachent des actes déshumanisants provoquant une souffrance et un traumatisme qui laissent des empreintes souvent indélébiles, pour la vie, dans la chair et les entrailles des victimes.
 
En 2015, la recrudescence des violences faites aux femmes, quelles que soient leurs types, constituent un recul révoltant de notre civilisation, et une régression de l’un des plus grands progrès du XXe siècle. Ces cents dernières années, les femmes se sont soulevées de par le monde pour recouvrer leurs droits, souvent avec succès, modifiant le paradigme de la soumission et de la domination masculine pour tendre vers l’égalité des sexes, clef de voûte d’une société orientée vers un développement inclusif et la prospérité pour tous.
 
Mesdames, Messieurs,
 
Les violences que nous observons en temps de guerre sont le résultat de l’exacerbation des discriminations et de violences existants dans la société en période de paix, au sein des communautés. Et, lorsque l’état de droit est en faillite et que la guerre éclate, quand il n’y a plus ni loi ni foi, le démon machiste s’exprime dans toutes ses formes, comme on l’observe aujourd’hui avec effroi dans tous les conflits modernes, où les femmes et les enfants sont les premières victimes des guerres décidées entre les hommes, souvent pour des mobiles bassement économiques. 
 
En effet, au mépris des principes élémentaires du droit international humanitaire, les femmes et les enfants sont devenus de plus en plus les cibles privilégiées des combattants pour désorganiser les communautés adverses et les assujettir. En Bosnie, au Rwanda et au Soudan, le viol a été utilisé comme une technique de nettoyage ethnique. Au Nigeria, en Irak, en Syrie, la vente des femmes sur des marchés d’esclaves fait la honte de la communauté internationale et nous interpelle.
 
Quel recul au XXIe siècle vers la triste mémoire de l’esclavagisme et de la traite des êtres humains !
 
**II. Le viol comme arme de guerre : une arme de destruction massive, d’humiliation et de domination. Impact et conséquences**

Les viols et les violences sexuelles sont utilisés comme une arme de guerre, plus qu’une arme de guerre : une stratégie, une tactique de guerre.
 
Le viol en temps de conflit ne doit pas être confondu avec un acte sexuel non consenti et humiliant – dont je ne veux en aucune manière amoindrir la gravité.  Le viol comme arme de guerre est une négation de l’humanité, dans un rapport de force où l’autre s’apparente à une chose.  Le viol comme stratégie de guerre nie la qualité d’être humain de la victime, mais vise aussi la destruction de la femme, de la famille, de toute une communauté.  
 
A l’Est de la RDC, le viol utilisé comme une stratégie de guerre se caractérise par le fait qu’il est massif (1), méthodique (2) et systématique (3).
 
**1.    Massif:** en moins de 24h, des dizaines voire des centaines de femmes et de jeunes filles sont violées dans un village, en public, sous les yeux de leur famille, dont les pères, les maris, les frères et les fils sont parfois acculés à commettre des actes horribles sur celles qu’ils chérissent le plus : leurs filles, leurs femmes, leur sœurs. Le fait que ces viols soient commis en public occasionne des victimes directes et indirectes, amplifiant ainsi le nombre des victimes. 

Mesdames, Messieurs,

C’est ce qui est arrivé, parmi de trop nombreux exemples, à Fizi, dans la Province du Sud Kivu, au bord du lac Tanganyika, lors de la nuit de la Saint Sylvestre, en 2011. Le Lieutenant Colonel Mutuare Daniel Kibibi avait ordonné à ses hommes de piller le village de Fizi, et de violer les femmes et les jeunes filles la nuit du Nouvel An. Les médecins qui sont ensuite intervenus sur place ont dû soigner 62 femmes qui avaient été violées avec extrême violence. Lors du procès où ce haut gradé de l’armée congolaise, auteur et commanditaire de viols de masse, a été reconnu coupable de quatre chefs de crimes contre l’humanité et condamné à 20 ans de prison, une femme aux cheveux blancs a confié avoir été battue et violée par 12 soldats, par voies vaginale et anale, sous les yeux de son mari et de leurs enfants. 

Ce procès fait figure d’exception dans le climat d’impunité qui prévaut en RDC.

**2.    Méthodique: **Ce viol est méthodique car, chaque groupe armé a son propre mode opératoire. De sorte que l’on peut distinguer clairement quelle lésion a été commise par quel groupe, qui laisse sa signature sur le corps des victimes. Il s’accompagne de tortures et de nombreuses victimes deviennent des esclaves sexuels. 
 
**3.    Systématique:** Il ne tient ni compte de l’âge ni du sexe. Le viol est commis aussi bien sur des bébés que sur des personnes âgées, et même si les femmes constituent l’écrasante majorité des victimes directes de ces atrocités, des hommes font également l’objet de violences sexuelles.
 
Nous sommes amenés à faire un constat face à ces crimes sexuels commis à grande échelle sur la population civile : ces crimes sont planifiés, comme dans le cas de Fizi, et font l’objet d’instructions de supérieurs hiérarchiques – de forces gouvernementales ou autres groupes armés non étatiques contrôlant un territoire donné. On recense aujourd’hui plus de 70 groupes armés à l’Est du Congo, dont les deux principaux sont les FDLR, milice déstabilisant les deux Kivus depuis la gestion catastrophique de la fin du génocide au Rwanda en 1994, et les ADF-Nalu, groupe armé d’origine ougandaise affiliée au mouvement djihadiste al-Shabaab, qui s’est encore distingué la semaine dernière par le massacre de civils dans un hôpital au Nord Kivu, dans le Territoire de Beni. 

Le Représentant du Secrétaire Général des Nations Unies en RDC, Mr. Maman Sidikou, a condamné ces lâches attaques lors d’une visite de solidarité.  Il a déclaré sur place : « Vous ne pouvez pas imaginer ce que j’ai vécu personnellement parce qu’ils ont tué des gens sur le lit de l’hôpital. Ils ont tué des enfants de deux ans. Ils ont tué une infirmière à bout portant. Ils ont brûlé, saccagé, ils ont emporté les médicaments». J’avais vécu la même chose en octobre 1996 à l’Hôpital de Lemera, où 33 de mes patients ont été assassinés sauvagement, ainsi que plusieurs membres du personnel soignant. Cette violation grave du droit international humanitaire était le premier acte de guerre au Congo, et est resté impuni jusqu’à ce jour.

Ces atrocités de masse devraient retenir toute l’attention de la justice congolaise et, à défaut de capacité ou de volonté, de la justice pénale internationale.  
 
Car cette nouvelle arme, cette nouvelle stratégie de guerre est non seulement moins chère que les armes classiques mais aussi extrêmement efficace, puisqu’elle produit les mêmes impacts, à savoir : le déplacement massif de la population (1), la réduction démographique (2), la destruction du tissu social (3), et la destruction des capacités économiques des communautés affectées (4).
 
1.    Le déplacement massif de la population est provoqué par la terreur de ces viols qui sont dans la grande majorité des cas collectifs et publics, et souvent accompagnés d’actes de tortures sur le corps des femmes. Les victimes sont ensuite rejetées par leur communauté, et les hommes, n’ayant pas été capables de protéger leur famille, quittent leur village dans la honte pour chercher l’anonymat. Pour chercher la sécurité, les femmes et les enfants sont aussi acculés à quitter leurs campagnes. Ce phénomène entraine un exode massif des populations rurales vers les centres urbains, laissant le champ libre aux milices pour contrôler le territoire, et s’accaparer les ressources naturelles stratégiques dont regorgent l’Est de la RDC.

2.    La réduction démographique est conséquente de trois facteurs : la destruction de l’appareil de reproduction de la femme par différents types d’outils ou de produits et même des brulures ; la contamination des IST (infections sexuellement transmissibles) provoquant l’infertilité – spécialement le Clamydia et la Gonorrhée ; et enfin la contamination par le VIH/SIDA, qui fait des femmes les réservoirs du virus, et entraînent la mort douce de la communauté.

3.    La destruction du tissu social par les actes d’humiliation et de déshumanisation conduit à la perte de l’estime de soi et de l’identité individuelle et collective, aboutissant à la destruction de la cohésion communautaire, qui est exacerbée par les enfants nés du viol, dont la filiation est rarement établie, et qui sont rejetés par leur communauté, qui les traitent d’ « enfants serpents », et qui constituent une nouvelle génération d’apatrides avec un potentiel élevé de perpétrer des violences cycliques. 

4.    La destruction des capacités économiques des communautés affectées est la conséquence du pillage de leurs biens et de leur récolte, de la destruction de leurs maisons, et du pillage et de l’exploitation illégale des ressources naturelles et minières par les milices et les « seigneurs de guerre ».

Ces quatre impacts concourent à plonger les communautés affectées dans un état de pauvreté extrême, à la destruction de la cohésion sociale, à l’incapacité organisationnelle et ne laisse pas d’autres choix à la population que de s’exiler ou de s’assujettir. 

**III. Le modèle d’assistance holistique de Panzi**

Mesdames, Messieurs,

Lors de la fondation de l’Hôpital en 1999, notre objectif était de contribuer à réduire la mortalité maternelle et d’améliorer les soins obstétricaux d’urgence aux femmes enceintes de la périphérie de la ville de Bukavu, la capitale de la Province du Sud Kivu, à l’Est de la RDC. Mais dans un contexte de conflits armés, nos premières patientes ne sont pas arrivées pour recevoir une césarienne, mais plutôt pour se faire soigner des blessures génitales liées au viol.
 
Nous avions dans un premier temps pensé qu’il s’agissait d’un acte isolé et, très vite, le nombre de femmes victimes de viols commis avec extrême violence a afflué vers Panzi. Par conséquent, le besoin d’apporter un soutien spécifique à ces femmes survivantes de violence sexuelle était devenu pressant et évident.

Depuis sa création et au fil des années, le personnel de l’Hôpital de Panzi a donc été amené à se spécialiser dans la chirurgie réparatrice, et nous avons développé un modèle d’assistance holistique qui comprend 4 piliers, et où la santé globale des femmes est au cœur de notre attention.
 
Depuis 2008, grâce à la création de la Fondation Panzi RDC qui nous a permis d’élargir nos activités et nos zones d’interventions pour compléter les activités de l’Hôpital et inclure la prise en charge individuelle (1) dans le soutien plus général au relèvement communautaire (2).
 
**1.    La prise en charge au niveau individuel**

Le pilier médico-chirurgical constitue fréquemment la porte d’entrée des patientes dans le système de prise en charge. Elles arrivent avec des lésions génitales mais aussi des troubles psychologiques qui nécessitent avant et après l’intervention chirurgicale une prise en charge psycho-sociale, qui est notre deuxième pilier.
 
Pour permettre une autonomisation des victimes après le traitement, nous offrons une assistance socio-économique – le troisième pilier – et pour celles qui le demandent, nous les accompagnons devant les Cours et Tribunaux, dans le cadre de notre quatrième pilier qui est l’assistance légale.
 
Permettez-moi d’approfondir les quatre volets de cette assistance holistique : le volet médical (1),  psychologique (2), socio-économique (3) et  légal (4).
 
Les soins physiques offerts aux patientes prennent en considération leur situation complète de santé et vise à répondre aux besoins spécifiques de chaque personne. Cette prise en charge médicale personnalisée consiste en premier lieu par des efforts de prévention : si la victime se présente endéans les 72 heures – le délai idéal pour prévenir le risque de contracter le VIH/SIDA, les infections sexuellement transmissibles (IST) et la grossesse non désirée, nous proposons l’administration du kit PEP (prophylaxie post-exposition).

Après 72h, nous assurons le traitement des IST, ainsi que la prise en charge des patientes atteintes du VIH/SIDA, et nous apportons la meilleure réponse chirurgicale possible pour réparer les organes génitaux et les fistules, notamment en ayant recours à la laparoscopie.
 
Au même moment, la prise en charge psychologique est dispensée, et constitue une phase importante des soins prodigués aux femmes survivantes de violences sexuelles.
 
Lorsque les patientes se portent mieux sur le plan physique et psychologique, nous les accompagnons à la maison d’accueil et de transit « Dorcas » et/ou à la « Cité de la Joie », où se poursuit la réhabilitation avec l’encadrement psychologique et le renforcement des capacités visant à l’autonomisation des femmes sur le plan social, économique et politique.

A la « Maison Dorcas », les femmes et leurs dépendants sont hébergés pour une durée indéterminée – en moyenne 3 mois, en fonction de la gravité de leur traumatisme et de leur situation personnelle et familiale. Nous leur offrons des cours d’alphabétisation, des formations d’apprentissage de métiers divers comme la vannerie, la savonnerie, la coupe et couture, etc. Nous couvrons les frais de scolarité des enfants qui ont été victimes directement ou indirectement et animons une crèche et une aire de jeux pour eux. Tout récemment, en juillet 2015, nous avons monté un studio dans le cadre de la musicothérapie, et une première chanson a été écrite et composée par des femmes survivantes. Le titre de cette chanson est : « Parce Que J’ai Mal ».

A la « Cité de la Joie », l’un des projets de la Fondation Panzi RDC, des jeunes femmes âgées de 15 à 25 ans sont accueillies pour une période de six mois. Dans une atmosphère chaleureuse et communautaire, les participantes suivent différents programmes et activités visant la dé-traumatisation : prise de parole en public, apprentissage du fonctionnement du corps, des outils de communication moderne comme l’informatique et l’anglais, ou d’autres activités visant à permettre aux femmes victimes de regagner la confiance en elles, telles que l’ergothérapie, la danse ou le self-défense.
 
Enfin, notre programme « Un toit pour les survivantes » offre aux femmes l’occasion de se construire leur propre toit. J’ai le plaisir de partager avec vous le témoignage d’une de mes anciennes patientes, Espérance, je cite : « Aujourd’hui, je ne suis plus la risée des voisins, je m’habille et nourris mes enfants du petit commerce reçu de la Maison Dorcas, mes enfants étudient, je n’ai plus de chocs psychologiques (…), et j’habite une maison décente, j’ai récupéré ma dignité ». Il s’agit d’une véritable révolution dans la société africaine où l’accès à la propriété a depuis toujours été réservé aux hommes. Et Espérance ajoute : « Si un homme veut vivre avec moi, il vient vivre chez moi, et si un jour il désire partir, je reste chez moi et pas le contraire ! Je ne serai plus chassée ».
  
Sur le plan socio-économique, nos bénéficiaires sont insérées dans des programmes de micro-crédits et nos activités consistent également à renforcer leurs capacités afin de permettre aux femmes d’accéder aux nouveaux marchés, et de leur donner des profils professionnels correspondant à ces marchés, ou en initiant diverses activités génératrices de revenus pour permettre leur survie et pour assurer l’éducation de leurs enfants. 

Mesdames, Messieurs,

Je suis touché de partager avec vous l’histoire d’une femme qui m’a fort bouleversé. Après avoir été violée et contaminée par le VIH, devenue veuve suite à l’assassinat de son mari, Rose va être prise en charge par l’Hôpital pour le traitement du Sida. A son admission, cette femme adulte pesait à peine 30 kilos, et son pronostic vital était en jeu. Elle était hantée par la mort, angoissée à l’idée de laisser ses enfants orphelins de père et de mère. Après avoir été entourée d’amour et de soins appropriés, elle a repris doucement. 

A la sortie de l’Hôpital, elle a été insérée dans un programme de coupe et couture et d’agriculture. Au bout de 5 ans, Rose est venue nous présenter à Panzi ses enfants qui sont désormais scolarisés ; elle a pu s’acheter sa maison grâce à la vente de boutures de manioc, et elle évalua, avec un sourire de satisfaction au bout des lèvres, son capital à 10.000$, alors que le micro-crédit qu’elle avait reçu s’élevait à 50$ !   Quelle résilience, quelle force !
  
Pour compléter notre prise en charge et restaurer complètement la dignité des patientes, la clinique juridique de Panzi offre aux femmes qui le désirent et qui le demandent l’assistance légale, qui comprend la constitution du dossier, les frais de représentation et d’accompagnement tout au long de la procédure par les huit avocats de la clinique juridique. Au delà de faciliter l’accès à la justice, nous attachons un intérêt particulier à veiller à l’exécution des décisions judicaires, qui permet une réparation par la justice. Même si à ce jour, l’exécution des jugements demeure extrêmement rare,  l’objectif reste de parvenir aux réparations individuelles et communautaires.    
  
Notre stratégie vise à transformer la souffrance en force, transformer la peine en pouvoir, et d’outiller les femmes pour développer leur capacité à devenir autonomes à leur sortie. Une prise en charge holistique aide les femmes à reprendre confiance et l’estime d’elles-mêmes. De plus, nous constatons avec satisfaction que beaucoup de femmes, après quelques semaines ou mois de traitement, d’accompagnement et de renforcement de capacités, deviennent de véritables activistes des droits de la femme, protégeant non seulement leurs droits, mais aussi ceux de leurs enfants et de leurs communautés, faisant d’elles de véritables leaders dans leur milieu.
  
Le modèle d’assistance holistique développé à Panzi a commencé à être dupliqué, sous forme de « One stop center » ou de « Guichet unique » dont l’objectif est d’intégrer tous les besoins liés à la santé de la femme dans sa globalité au sein du système de soins de santé primaires, afin d’offrir aux femmes et aux jeunes filles un paquet de santé complet, accompagné par un système interne de référencement vers tous les services dont une femme peut avoir besoin, tant au niveau médical, que psychologique, socio-économique ou légal en assurant la non stigmatisation des victimes de violences sexuelles.

Nous devons éviter aux femmes victimes de violences et de traumatismes de revivre leur vécu douloureux auprès de chaque service de prise en charge. Face à la violence, nous devons répondre par l’humanité. Un système de santé avec une assistance holistique pour les femmes ayant subi toutes sortes de violences se doit d’apporter tant un accueil qu’une réponse personnalisée, de qualité et globale, en tenant en compte de tous les besoins de l’individu, et en cherchant à prévenir la re-traumatisation. C’est ce que nous nous efforcerons de faire à Panzi.

A l’heure actuelle, nous avons déjà répliqué en zone rurale ce modèle où les femmes trouvent donc au même endroit tous les services comprenant aussi bien les paquets de la protection maternelle et infantile, la consultation prénatale, l’accouchement, le planning familial, la consultation post natale ainsi que le paquet de violence sexuelle et basée sur le genre (SGBV).

La plus-value de notre système est sa vocation à insérer la santé mentale dans le système de santé de soins primaires existants et nous encourageons vivement tous les partenaires de la coopération au développement à insérer la santé mentale dans les services de soins santé primaire et à soutenir une approche holistique du traitement du trauma.
 
**2.    La prise en charge au niveau communautaire**

 La prise en charge ne peut se limiter à l’assistance individuelle.
 
Une fois que les femmes victimes de violence sexuelle sont traitées sur le plan individuel, il est important de prendre en charge la communauté qui est appelée à les accueillir pour éviter de nouveaux traumatismes souvent liés au rejet dus aux normes sociales, souvent rétrogrades.

Je tiens à partager avec vous l’histoire d’une femme appelée Immaculée, violée collectivement par des groupes armés, ayant fait l’objet de tortures et autres traitements inhumains et dégradants, qui est venue chercher secours et assistance à Panzi. Nous avons fait tout ce dont nous sommes capables pour lui venir en aide, autant sur plan médical que psychologique et humain. Et elle était guérie, mais avait peur du monde extérieur. Le jour prévu de sa sortie de l’Hôpital, je lui ai dit : « Courage et bonne chance, nous sommes ensemble ». Trois ans plus tard, cette femme est revenue à Panzi. Elle avait été à nouveau violée avec une violence extrême, et cette fois-ci, ma patiente se retrouvait enceinte et contaminée par le virus du VIH/SIDA. Ces situations, extrêmement lourdes et pénibles tant sur le plan humain que médical, ne pouvait rester sans réponses.

Telle est la raison pour laquelle nous nous sommes investis dans l’accompagnement des femmes après leur prise en charge au niveau de l’Hôpital et de la Fondation, et que nous nous sommes engagés dans des programmes de relèvement communautaire, en vue de contribuer à l’établissement d’un environnement favorable à la réinsertion des femmes victimes dans leurs communautés d’origine, souvent enclines à les stigmatiser.

Il faut rétablir l’identité communautaire en redéfinissant le rôle de chaque membre. Les sensibiliser pour qu’ils réintègrent la responsabilité de protection et de soutien mutuel.  Dans ce même registre, nous faisons des campagnes pour rompre le silence, car le silence après le viol est un mode de pérennisation du viol au sein des communautés affectées, mais aussi dans l’ensemble de la société.

Nous menons également des formations des para-juristes dans les villages qui sensibilisent les populations locales et qui soutiennent, orientent et conseillent les femmes victimes de violence sexuelle. Ce travail se fait en partenariat avec le monde associatif et les organisations de défense des droits humains, les Eglises et les leaders coutumiers.
Sur le plan social, avec nos équipes et en collaboration avec nos partenaires, nous faisons la médiation familiale entre époux et épouses mais aussi entre membres de la famille. Même si parfois, on arrive à un succès au travers de la réconciliation à l’échelle familiale, il faut aussi que la famille soit acceptée par la communauté. 

Sous la contrainte des armes, il arrive parfois qu’un enfant d’une famille soit forcé à violer un membre de sa famille ou un voisin… cet enfant est alors rejeté par tout le monde, ce qui est le but recherché par ceux qui commettent de tels viols. Il faut donc une réconciliation tant horizontale que verticale.

Les enfants issus du viol sont innocents, mais sans une filiation bien établie au sein de la communauté, ils ne sont donc pas toujours acceptés, ni inscrits à l’état civil, parce que le père est inconnu ou la famille ne veut donner son nom à une enfant né de l’ennemi. Nos services de maternité et les autorités ont étroitement collaboré dans le cadre de campagnes menées pour qu’ils soient inscrits au registre de l’état civil. Mais ceux qui sont nés avant sont abandonnés à eux-mêmes et sont des apatrides. 

C’est seulement par le changement des comportements et des normes sociales de toute la communauté envers les victimes qu’il peut y avoir une acceptation sociale de l’enfant et endiguer ce sentiment de culpabilité. L’ensemble de ces actions vise à reconstruire le tissu social déchiré par ces viols. C’est la seule façon de réintroduire les victimes dans une société où elles seront acceptées et accueillies.

Pour retisser les liens communautaires, nous initions beaucoup d’activités agricoles et d’élevages en solidarité communautaire, et nous avons également mis en place des mutuelles de solidarité et des « associations villageoise d’épargne et de crédit ». Toutes ces activités augmentent non seulement la capacité économique des communautés détruites, mais aussi recréent une cohésion sociale et une capacité organisationnelle.

Pour finir, on ne peut pas reconstruire le tissu social seulement avec les femmes. Ainsi, nous avons crée un mouvement l’hommes engagés pour lutter contre les violences faites aux femmes, les V-MEN Congo, car les violations des droits de la femme ne sont pas que l’affaire des mouvements féministes, et doivent susciter une mobilisation de l’ensemble de la société.

**IV. Notre plaidoyer pour traiter les causes de la violence**
 
Mesdames, Messieurs,
 
Le jour où nous avons constaté avec horreur que les enfants nés du viol étaient à leur tour devenus les victimes des bourreaux de leur mère, sacrifiant une nouvelle génération de victimes, nous avons compris que notre rôle ne pouvait se limiter à la salle d’opération.
 
En tant que professionnels de la santé, et face à une indifférence voire un déni qui a trop longtemps prévalu face aux drames vécus par les femmes congolaises, nous nous sommes engagés dans un plaidoyer pour la paix et la justice, parce que nous ne pouvons pas seulement continuer jour après jour à traiter les conséquences de la violence, nous devons également nous attaquer à ses causes profondes et empêcher la répétition.
 
Pour mettre un terme aux violences sexuelles en période de conflits, il faut d’abord la paix. Et ensuite lutter contre l’impunité pour les crimes à caractère sexuel.
 
Trop souvent en RDC, la justice a été sacrifiée sur l’autel de la paix avec des accords politiques à court terme qui portaient en eux les germes de nouveaux conflits, avec son lot d’atrocités de masse et de violences sexuelles.
 
En fin de compte, la population congolaise n’a ni la justice, ni la paix car la politique de promouvoir des criminels au sein des institutions ne peut pas être un mécanisme de règlement pour une paix durable, ni pour l’instauration d’un état de droit respectueux des libertés fondamentales.
 
Nous sommes convaincus de la nécessité d’avoir recours à tous les mécanismes qu’offre la justice transitionnelle pour parvenir à la consolidation de la société et la stabilité en RDC.
 
Il ne peut y avoir de paix ni de développement durable sans respect des droits humains, sans assainissement de la fonction publique – vetting – et une profonde réforme du secteur de la sécurité, sans mécanisme d’établissement de la vérité en vue de la réconciliation, sans réparation pour les violences faites aux femmes et aux communautés affectées, sans l’édification de mémoriaux destinés à honorer les millions de morts et les centaines de milliers de femmes violées durant ces vingt dernières années de conflits et d’instabilité à l’Est de la RDC.
 
La lutte contre l’impunité des crimes les plus graves, y compris les crimes de violence sexuelle, est une priorité et doit être placée au cœur du processus de paix et de la transition démocratique.
 
En RDC, nous attendons toujours l’établissement d’un tribunal pénal international et/ou la création de chambres spécialisées mixtes pour juger ces crimes de violence sexuelle qui choquent notre humanité commune, et qui ont été qualifiés comme crime contre l’humanité et comme acte constitutif du crime de génocide, respectivement par les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.
 
Tant que l’impunité sera tolérée, ces crimes se poursuivront. Il faut combler le fossé existant entre le droit et sa mise en œuvre, entre les normes juridiques et les normes sociales. La communauté internationale devrait utiliser tous les leviers possibles pour que les signataires d’Accords et de Conventions internationales respectent leurs engagements, et dresser des lignes rouges à ne pas franchir : ceux qui recrutent des enfants soldats et les utilisent pour commettre le viol comme stratégie de guerre doivent être poursuivis et jugés.
 
Mesdames, Messieurs,
 
Nous sommes tristement bien placés pour parler des conséquences des violations massives des droits de l’homme liées à l’exploitation et au commerce illégal des minerais, appelés parfois « minerais des conflits » ou « minerais de sang » –  l’or et les « 3T » à savoir l’étain, le tungstène et le tantale (dont on extrait le célèbre coltan).
 
Nous avons mené des études qui établissent clairement une corrélation entre le nombre de cas de viols et les zones où se concentrent les mines. Nous sommes les témoins d’une nouvelle forme d’esclavagisme des femmes, mais aussi des enfants qui travaillent dans des conditions inhumaines, et qui sont victimes de toutes sortes d’abus.
 
Nous observons également avec désolation la dégradation de notre environnement : certaines sociétés sans éthique n’hésitent pas à déverser des produits chimiques dans nos fleuves et nos rivières, menaçant l’un des plus riches écosystème de notre planète.

Malgré notre souffrance, nous ne cédons pas au fatalisme ou à l’ « afropessimisme », car nous pouvons inverser la tendance, les solutions existent : si la mauvaise gestion des ressources naturelles et la corruption constituent des freins importants pour le développement en Afrique, voire une malédiction pour les communautés locales concernées, il y a toutes les raisons de croire qu’une bonne gouvernance et une gestion transparente et responsable constitueront un formidable levier pour un développement endogène et une clef pour la transformation de nos sociétés.
 
Et nous avons été très encouragés le 20 mai dernier par le vote du Parlement Européen en faveur d’une régulation contraignante visant à garantir un approvisionnement responsable et transparent des minerais des conflits par une traçabilité de toutes les étapes de la chaîne, de l’achat des matières premières à la transformation en produits finis.
 
Ce vote a été une victoire d’étape pour les droits de l’homme et la lutte contre les violences faites aux femmes dans l’Est de la RDC. Avec humilité et espoir, nous appelons aujourd’hui les Etats membres de l’Union Européenne, et la Belgique en particulier, à défendre cette position au sein du Conseil européen, afin de contribuer à transformer les minerais de sang en minerais pour le développement et la paix.
 
Cette occasion unique doit être saisie par les responsables politiques, mais également par la société civile, et interpeller chacun de nous, citoyen et consommateur des produits finis de ces minerais.
 
Nous portons tous dans nos poches des téléphones, des tablettes et autres objets de consommation courante qui sont devenus des composants inséparables de notre vie quotidienne.

Nous en avons tous besoin, mais chacun a le droit de savoir si son téléphone ou son ordinateur est propre, si les composants électroniques utilisés pour leur fabrication n’ont pas été associés aux violences sexuelles. Nous avons ce droit et nous devons le revendiquer, afin de ne pas se voir associé indirectement aux crimes les plus graves commis en ce début de XXIe siècle. Le commerce des minerais qui composent nos nombreux objets électroniques doit cesser de financer les guerres et devenir responsable et transparent !
Enfin, nous effectuons un plaidoyer pour la participation des femmes à toutes les étapes du processus de paix et de sa consolidation, et encourageons leur participation politique dans les élections à venir en RDC. Nous ne pouvons continuer à parler de l’état de la société et chercher à trouver des solutions pour remédier aux enjeux qui nous concernent tous sans donner la voix à plus de la moitié de la population mondiale.
 
**V. Conclusion.**
 
Nous arrivons au terme de cette conférence. Nous voulons faire remarquer à l’assemblée que la suite logique de nos actions a été dictée par les évènements douloureux auxquels nous avons été confrontés : la mortalité maternelle nous a conduit à la construction de l’Hôpital ; les viols commis avec extrême violence nous ont amené à développer un service de chirurgie de réparation génitale ; l’exclusion communautaire des victimes nous a conduit à encourager une réinsertion socio-économique de nos patientes et à contribuer aux efforts de lutte contre l’impunité ; le traitement d’une deuxième génération de victimes nous a appelé à porter la voix et les cris des femmes congolaises au sein des instances internationales, dans le cadre de notre plaidoyer, pour chercher à mettre fin à la guerre et à l’instabilité, qui ravage toujours l’Est de la RDC.

Nous ne pouvons nous limiter à réparer les conséquences de la violence, nous devons traiter ses causes. Le retour à la paix est la première condition indispensable à l’autonomisation des femmes. 

Je vous ai présenté le modèle d’assistance holistique développé à Panzi, où la prise en charge individuelle s’accompagne d’une prise en charge communautaire. Notre objectif tend à placer les besoins de la femme au cœur du système de santé, et à transformer les femmes victimes en actrices autonomes du changement qui – nous le pensons, viendra par les femmes. 

Nous sommes tous concernés et chacun de nous peut dans sa sphère d’action contribuer à mettre fin aux viols et autres formes de violence sexuelle et basée sur le genre. Nous ne pouvons pas rester indifférents au sort des milliers de femmes à travers le monde qui sont soumises à un traitement inhumain tout simplement parce qu’elles sont nées femmes.
  
Enfin, nous devons modifier le paradigme de la domination masculine, faire évoluer les mentalités et promouvoir une société paritaire et inclusive où la femme est l’égale de l’homme.

Mesdames, Messieurs, 

En RDC, l’insécurité et l’instabilité persistent. Dans un contexte pré-électoral extrêmement tendu et incertain, nous assistons à une dérive autoritaire et à un rétrécissement de l’espace des libertés pour la société civile. Les signaux d’alerte sont au rouge. Nous ne pouvons nous permettre d’assister passivement au sacrifice d’une nouvelle génération et nous partageons pleinement la position de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) qui, dans une déclaration récente, a lancé un cri d’alarme : « Il faut arrêter de faire couler le sang ».
 
Trop longtemps, l’indifférence a été à l’origine de l’omission d’agir. Le temps n’est plus à l’indignation, mais à l’action.
 
Je vous remercie.
Dr. Denis Mukwege

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