RENCONTRE DR. NEEMA RUKUNGHU “DR. NENE”

Médecin et expert en soins holistiques, Unité SVS
Hôpital de Panzi

Connue de ses patients et de ses collègues sous le nom de “Dr. Nene”, elle maintient une présence positive et réconfortante dans des situations difficiles et apparemment impossibles en tant que médecin à l’hôpital Panzi.

GARANTIR LE RESPECT ET LA DIGNITÉ DE TOUS LES SURVIVANTS

Le Dr Nene fait partie intégrante de la communauté de Panzi. Depuis ses débuts en tant qu’interne à la maternité de l’hôpital en 2003 jusqu’à la direction de l’équipe des survivants de violences sexuelles (SSV) pendant près d’une décennie, le Dr Nene a joué un rôle essentiel dans le développement et l’expansion du modèle holistique, tant en RDC qu’à l’étranger.

Au cours des 15 dernières années, elle a cherché à établir un lien personnel avec chaque patient. Elle note que ce lien est souvent difficile à créer – alors que les survivants peuvent partager des informations sur leurs blessures physiques pendant le traitement médical, il leur faut beaucoup plus de confiance pour partager la douleur qui n’est pas visible. Elle travaille sans relâche pour s’assurer que les survivants comprennent leur dignité, malgré le traumatisme qu’ils ont subi, et plaide en faveur de l’importance de l’autosoin. Ci-dessous, le Dr Nene partage l’histoire d’un survivant qui l’a particulièrement marquée.

Le voyage de Nina
Nina est arrivée à l’hôpital de Panzi alors qu’elle n’avait que 13 ans. Orpheline, elle et ses deux petits frères avaient été recueillis par leur oncle. Peu après avoir emménagé avec lui, il a emmené Nina dans un champ vide et l’a violée. Ils ont été découverts par d’autres membres de la communauté et l’oncle a accusé la jeune fille de sorcellerie dans une tentative inadmissible de justifier le viol. Les membres de la communauté se sont alors retournés contre elle.

Un groupe de religieuses a trouvé Nina et l’a emmenée dans un centre de santé qui n’était pas en mesure de fournir des soins complets après le viol ou de traiter l’infection grave qu’elle avait contractée. Elle a été envoyée à Panzi, où elle a été traitée pendant plus de trois mois.

Malgré nos efforts, l’état de Nina a continué à se dégrader. Elle a demandé à parler une dernière fois à ses petits frères, pour s’assurer qu’ils iraient bien, et après leur conversation, elle est décédée. Pendant son séjour à Panzi, elle a confectionné des fleurs en soie, une activité courante chez les survivants. Elle a offert ces fleurs au Dr Nene, qu’elle possède encore aujourd’hui. Les fleurs et l’histoire de Nina sont à la fois un rappel douloureux de la brutalité – et parfois de la fatalité – des violences sexuelles, et une source d’inspiration pour continuer à prodiguer des soins compatissants à toutes les survivantes.

UN TRAVAIL ÉPROUVANT, MAIS ÉPANOUISSANT

En raison des violences sexuelles qui se poursuivent et augmentent en RDC, il y a toujours des survivants qui franchissent les portes de Panzi. En tant que médecin, il s’agit d’une situation incroyablement difficile, qui peut parfois sembler impossible et impuissante. Mais le Dr Nene est constamment inspiré par les femmes qui arrivent à Panzi complètement brisées et qui se transforment en quelqu’un qui a guéri et qui est heureux, qui rit et qui sourit à nouveau.

L’histoire de Jane, que le Dr Nene nous a racontée, en est un bon exemple. Jane a subi l’inimaginable. Elle est arrivée à Panzi avec des blessures visibles et invisibles qui semblaient impossibles à guérir. Aujourd’hui, elle s’est transformée en un phare de joie et de lumière. Elle possède sa propre maison et est un élément essentiel de notre organisation sœur, la Cité de la joie. Elle est une source d’inspiration pour tous les survivants qui la rencontrent.

Des moments comme celui-ci lui donnent l’énergie et la force de continuer et démontrent la puissance et l’importance de notre modèle de guérison holistique.

IL FAUT CHANGER DE PERSPECTIVE POUR METTRE FIN AUX VIOLENCES SEXUELLES DANS LES CONFLITS

Le Dr Nene est convaincue que la violence sexuelle survient lorsqu’un être humain cesse de considérer l’autre comme un être humain. Elle soutient que nous devons voir l’humanité des autres – et en particulier celle des femmes. Elle note que nous devons nous voir nous-mêmes dans les autres, ce qui nous aide à prendre soin les uns des autres.

“Nous avons besoin de nous voir dans les autres, ce qui nous aide à prendre soin les uns des autres.”